Captive State
Coécrit, coproduit et réalisé par Rupert Wyatt (2019)
Les aliens ont pris le pouvoir et asservi le monde afin de s’accaparer de ses ressources naturelles. Dans le Chicago d’un futur proche et glauque, un groupe de résistants tente un dernier baroud d’honneur pour sauver l’humanité. Un impassible collabo (John Goodman, ambigu et réservé) à la tête d’un dispositif de surveillance digne de la Chine leur donne la chasse. Tandis qu’un jeune Afro-Américain hésite entre agir et survivre.
Captive State est un film d’espionnage qui dissimule son propos sous le prétexte de la science-fiction. Plutôt que les scènes d’action – peu nombreuses- et les effets spéciaux – moyen-, l’œuvre distille une critique cinglante de la pulsion de mort du capitalisme (images d’actualité comprises) qui creuse la terre comme un vers une pomme. En laissant sur son cadavre en putréfaction 99 % de la population.La photographie crépusculaire et les nombreux extérieurs d’une métropole plus dévastée que nature (Chicago sans effets spéciaux) colorent nos hommes de l’ombre d’une teinte lugubre. Les messages manuscrits de la résistance passent de mains en mains d’anonymes dans de longues séquences. La caméra d’épaule, tremblante, le jeu astucieux des flous, enrôlent de force le spectateur dans cette guérilla.La guerre c’est sale : des motivations des héros nous ne saurons rien, il n’y a pas de grands discours. Et quand ils montent au front d’une bataille perdue d’avance, ces guerriers de l’ombre sniffent une ligne pour se donner du courage, comme de vulgaires terroristes.
Trop rares sont les films américains qui choisissent de laisser parler le silence plutôt que d’expliquer. Malgré un retournement prévisible, Captive State se donne les moyens de cultiver un genre Néo-noir déglingué bien à lui.D’autres se sont essayés à l’exercice de l’introspection décliniste déguisée en SF : The son of Man, District 9. Ceux qui ont échoué (Elysium et Looper en sont les exemples les plus frappants) sont ceux qui ont gardé les codes de l’action. Car on ne peut pas critiquer un système en un empruntant les valeurs. Après une carrière consensuelle à Hollywood, le britannique Rupert Wyatt signe un bon petit film produit par les promoteurs d’un cinéma critique, Participant médias.
Ça te plaira si : Tu tagues ACAB dans les ruelles de ton quartier, tu aimes l’Armée des Ombres, District 9, et les films d’espionnage ambigus.
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